Égalité professionnelle : vers une obligation de résultats… vraiment ?

Trois ans pour parvenir à l’égalité salariale. C’est l’ambition affichée par la Ministre du travail. Muriel Pénicaud a annoncé le 9 mai une dizaine de mesures relatives à l’égalité salariale hommes femmes. Derrière le discours volontariste, des inconnues persistent. En particulier sur la méthode commune retenue pour mesurer l’écart salarial, pourtant au cœur du dispositif (en accès libre).
Les entreprises de plus de 50 salariés auront bientôt l’obligation de se doter d’une enveloppe de rattrapage des écarts de salaires entre les hommes et les femmes. Elles auront 3 ans pour les résorber totalement. 4 si, partant de très loin, elles ont fourni d’importants efforts pour les réduire.
Avec 7 000 contrôles par an, l’Inspection du travail multipliera par quatre ses interventions sur ce sujet, qui deviendra l’une de ses priorités. L’objectif affiché par le gouvernement est clair : il faut passer d’une obligation de moyens à un impératif de résultat. Aujourd’hui sanctionnées si elles ne se dotent pas d’un accord sur le sujet, les entreprises le seront demain à hauteur de 1 % de la masse salariale si elles conservent des écarts de rémunération entre hommes et femmes à poste équivalent.
La dizaine de mesures présentée par Muriel Pénicaud, ministre du Travail, est issue de la concertation ouverte avec les partenaires sociaux, en mars dernier, sur cet enjeu et celui des violences sexistes et sexuelles. Des contraintes nouvelles qui ont fait l’objet de 6 réunions en deux mois. Le but : d’abord, anéantir l’écart de rémunération de 9 %, dit "inexpliqué", entre hommes et femmes qui exercent des fonctions semblables. Mais aussi intervenir sur l’écart général des salaires de 25 %.
Formation et gouvernance
Premier champ d’action pour ce 2e chantier : la formation. Travailler à temps plein et à temps partiel ouvrira les mêmes droits sur les comptes personnels de formation. Une mesure favorable aux femmes qui, pour 30 % d’entre elles, ne travaillent pas à temps plein alors que 80 % des temps partiels leur sont confiés.
Autre levier : les sociétés cotées se voient obligées, une fois par an, d’inscrire au conseil d’administration une délibération sur l’égalité professionnelle. La part des femmes dans le top management sera aussi rendue publique. Les comités exécutifs en comptent aujourd’hui à peine plus de 10 %.
Un outil de mesure dans les limbes
Mais la ministre se défend de toute volonté d’instaurer un système de "name and shame", lui préférant la notion de "name and change". Autre nuance : rien ne garantit pour l’heure que les écarts une fois comblés, ne se creusent pas à nouveau au gré des augmentations des uns et des autres. Surtout, la méthodologie commune d’évaluation des écarts de salaire fait encore l’objet de réflexions.
Sera-ce un logiciel spécifique comme en Suisse ? Un outil du système de paie ? Ou encore un élément de la déclaration sociale nominative ? En juin prochain, Sylvie Leyre, la directrice des ressources humaines de Schneider Electric France, chargée par le gouvernement d’une mission sur ce thème, devra soumettre aux partenaires sociaux des simulations.
Malgré cela, Muriel Pénicaud estime le calendrier tenable. Ces mesures seront, pour l’essentiel, intégrées sous forme d’amendements gouvernementaux au projet de loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel, un texte en discussion à compter du 29 mai au Parlement. Les obligations nouvelles pour les entreprises doivent quant à elles être mises en place dès le 1er janvier prochain.