Le Baromètre Achats Responsables 2017 de HEC et EcoVadis zoome sur les pratiques des grandes entreprises

Juliette Nicolas | 02 Avril 2017 | 884 mots

Barom%C3%A8tre%20HEC%20EcoVadis

En plein dans l'actualité de la nouvelle loi sur le devoir de vigilance et de la nouvelle norme ISO20400 Achats Responsables, la 7ème édition du Baromètre HEC/EcoVadis interroge : quelles évolutions pour les priorités et les pratiques des Responsables Achats des grandes entreprises ?

Des politiques d'approvisionnement responsable de plus en plus ancrées dans les pratiques des société donneuses d'ordre, mais un accompagnement limité des fournisseurs. Lancé en 2003 par l’école de commerce HEC Paris et la plateforme de notation RSE des fournisseurs EcoVadis, le Baromètre Achats Responsables mesure tous les deux ou quatre ans l’évolution des pratiques des grandes entreprises d’Europe de l’Ouest et des Etats-Unis. Le baromètre 2017 s’appuie sur 120 répondants, qui sont responsables des achats ou de la chaine d'approvisionnement de leur entreprise.

Des efforts plus poussés suite aux scandales et à la sortie nouvelles lois et normes ?

Le baromètre montre que la nécessité d’une politique d’approvisionnement responsable est de plus en plus ancrée chez les responsables achats et supply chain, en Europe comme en Amérique du Nord. 97% des répondants estiment que c’est un enjeu important ou très important, contre 40% en 2003. Les trois raisons principales de cette évolution semblent être l’image de marque, la réduction des risques, et la conformité (en deuxième place pour les Etats-Unis et en troisième place en Europe). En effet, plusieurs grandes entreprises ont subi les conséquences de scandales lié à leur manque de vigilance sur les pratiques de leurs fournisseurs. : on se souvient de l’effondrement de l’immeuble Rana Plaza au Bangladesh en 2013, qui a tué plus de 1000 salariés et entaché la réputation de nombreuses entreprises occidentales de prêt-à porter (Mango, Benetton, Primark, probablement aussi Carrefour, Auchan…). Le souci de conformité correspond au développement de lois et de normes nationales et internationales.

Ainsi, la loi sur le devoir de vigilance en France (2017 - lire nos articles ci-dessous), et la loi Dodd-Frank qui impose la transparence sur l’approvisionnement en or et « minerais de conflits (2010) ont suivi les principes et normes internationales basées sur le volontariat : Principes directeurs de l’OCDE (1976), Pacte mondial des Nations Unies (2000), la norme ISO 26000 (2010), Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme (2011) et récemment la norme ISO 20400 sur les achats responsables. D'où une mobilisation progressive des directions et les conseils d’administration qui sont plus engagés qu’avant pour la durabilité des achats et de la chaîne d’approvisionnement. Le manque de soutien de leur part était en effet cité comme obstacle majeur par 50% des répondants en 2013, et seulement par 24% des répondants en 2017. L’obstacle le plus souvent cité est aujourd’hui le manque de ressources internes (57%), ce qui est quelque peu en contradiction avec les déclarations sur le caractère prioritaire de cet enjeu.

Des pratiques encore à améliorer...

Mais que font-ils en pratique ? Les sociétés donneuses d’ordre évaluent et/ou auditent de plus en plus systématiquement leurs fournisseurs stratégiques directs (de "rang 1"). 45% des répondants déclarent couvrir un programme d’évaluation ou faire un audit pour plus de 75% de leurs volumes d’achat. Si cela représente encore moins de la moitié des répondants, c’est un net progrès par rapport à 2013, où ils n’étaient que 27% à déclarer couvrir plus de 75% de leurs volumes d’achat.

Cependant, ces évaluations d’achats responsables ne vont pas encore suffisamment loin. Seuls 15% des répondants affirment avoir une visibilité en termes de RSE et de développement durable sur leurs fournisseurs de niveau 1 et 2, et ils ne sont plus que 6% à déclarer avoir une visibilité sur leurs fournisseurs 3 et plus. Si une investigation aussi développée sur les achats peut paraître difficile à mettre en place, certaine entreprises se regroupent pour faciliter cet effort. Par exemple, Orange a été un des fondateurs de la JAC (Joint Audit Cooperation), une association d’opérateurs télécoms souhaitant améliorer l’évaluation RSE de leurs fournisseurs (de rang 1 à 3), en optimisant les coûts et les processus des audits. (lire notre l’article sur la conférence Vigeo).

Une compliance encore peu engagée

Mais le baromètre semble montrer plus une logique d’évaluation et d’audit qu’un réel accompagnement des fournisseurs vers une amélioration de leurs performances en termes de développement durable. En effet, le baromètre interroge pour la première fois les fournisseurs, qui étaient 360 à répondre dans le monde entier. Ils sont à peu près autant à penser que le développement durable est une « cause commune et fait l’objet d’actions concertées avec les donneurs d’ordre » (44%) que « c’est important sur le papier, mais les donneurs d’ordres n’agissent pas véritablement ». Parmi les bonnes pratiques, deux sont les plus souvent citées par les fournisseurs : la fixation d’objectifs environnementaux et sociétaux négociés, et la mise en place des plans de progrès sont les outils d’engagement.

Avec la nouvelle norme ISO 20400 sur les Achats responsables, adoptée en février 2017, les entreprises auront de quoi réfléchir sur la manière d’améliorer leur stratégie d’évaluation, audit et accompagnement des fournisseurs (de rang 1 et plus), pour une chaine d’approvisionnement plus responsable - mais toujours sans réelle contrainte, le législateur français ayant récemment renoncé aux sanctions financières liées au devoir de vigilance.

Télécharger: Télécharger le baromètre 2017 HEC-EcoVadis des achats responsables

POUR APPROFONDIR LE SUJET

CONTINUER LA LECTURE