ELLYX, une coopérative qui bouscule les codes de la recherche et du conseil

Juliette Nicolas | 21 Mars 2017 | 863 mots

ELLYX

L’agence de recherche et de conseil ELLYX est un véritable OVNI de l’Economie Sociale et Solidaire : agence de conseil spécialisée dans l’innovation sociale, elle a été reconnue Jeune Entreprise Innovante pour ses travaux de recherche en sciences sociales, et… c’est une SCOP. Jérémy Brémaud, co-fondateur et associé d’ELLYX, nous raconte la genèse de cette jeune coopérative.

L’agence de recherche et de conseil ELLYX est un véritable OVNI de l’Economie Sociale et Solidaire : agence de conseil spécialisée dans l’innovation sociale, elle a été reconnue Jeune Entreprise Innovante pour ses travaux de recherche en sciences sociales, et… c’est une SCOP. Jérémy Brémaud, co-fondateur et associé d’ELLYX, nous raconte la genèse de cette jeune coopérative basée à Bordeaux et Poitiers, créée en 2013 et comptant aujourd’hui 7 associés et 10 salariés.

Le choix de la SCOP

Le choix d'une organisation coopérative a été pour ses quatre fondateurs un choix à la fois militant et stratégique, et en tous cas raisonné. Le modèle de la SCOP s’est imposé pour ces quatre amis, afin d’évacuer la question financière au profit des relations humaines : une part, une voix. Le capital n’étant pas rémunéré, les associés n’ont pas à racheter au prix fort les parts sociales de celui ou celle qui souhaite quitter l’entreprise. De plus, c’est un choix de gouvernance fort qui prend en compte l’expansion future de l’agence : toute personne qui rejoint ELLYX devient partie-prenante et à vocation à devenir associé. La coopérative ne pourra jamais être rachetée, ce qui leur garantit autonomie et indépendance. Ainsi, une éventuelle croissance externe répondrait à une logique de co-construction, et non à une logique de fusion-acquisition classique, qui est de plus en plus fréquente dans le secteur de l’ESS (voir notre article sur l'enquête CHORUM sur la qualité de vie au travail dans les structures de l'ESS).

Ellyx a obtenu le soutien pour se lancer en 2013 du Réseau Entreprendre, du Crédit Coopératif, du Réseau France Active (au travers d'Aquitaine Active) et d'un prêt participatif SOCODEN - et est en cours de financement d'un tour de table abondé par BPIFFRANCE pour financer son besoin en fonds de roulement.

La R&D au cœur de leur métier

Reconnue Jeune Entreprise Innovante (JEI), ELLYX est une des premières agences à avoir été agréée par le Ministère de l’Education au Crédit Impôt Recherche (CIR) dans le domaine des sciences humaines et sociales. Les associés d’ELLYX forment une équipe multidisciplinaire – composée de doctorants et chercheurs en économie, droit, sciences politiques, sociologie, innovation, et compte également un géographe et un philosophe : une équipe aux talents complémentaires, qui requiert de structurer les connaissances à l'intérieur de l'entreprise en apportant du "knowledge management". Cela permet à Ellyx d’accompagner leurs clients sur des missions variées de R&D, via une prestation de recherche ou un accompagnement pour structurer le programme de recherche du client, lui-même pouvant bénéficier du CIR. Pour eux, l’innovation sociale peut se trouver partout, et leurs clients sont aussi bien des acteurs de l’ESS et des collectivités territoriales que des PME. Leurs activités de conseil s’appuient sur leur propre programme de recherche GenerIS, qui vise à développer de nouveaux outils et méthodes d’innovation sociale.

Une vision engagée de l’impact social

Sous prétexte de mesurer l’impact social, les entreprises et collectivités cherchent souvent à calculer les économies effectuées par les pouvoirs publics lorsqu’ils se déchargent de leurs fonctions au profit du secteur privé ou associatif, à l'instar de mécanismes comme les Contrats à Impact Social (lire ci-dessous). Or pour ELLYX, la mesure de l’impact social ne doit pas être réduite à la mesure d’une performance financière. Elle doit naître d’une réelle volonté d’améliorer la performance en termes de résolution de problèmes sociétaux. Les associés d’ELLYX choisissent d’accompagner et d’évaluer des projets ou des politiques dans le but d'éclairer cet impact social y compris dans des dimensions non financières, afin d'éclairer les choix politiques qui en découlent. Leurs activités comprennent aussi du conseil stratégique plus classique, comme l’accompagnement de fusions pour des structures de l’ESS ou le management du changement.

Quid de l'avenir du secteur de l’ESS ? Pour Jérémy Brémaud, le secteur tend à évoluer suivant une double dynamique. D’une part, l’éclosion de nombreuses micro-structures portées par des auto-entrepreneurs, avec un impact social difficilement mesurable. D’autre part, le développement de grosses structures issues de fusions et de regroupements, surtout dans le secteur du sanitaire et social et du service à la personne. Avec des taux de croissance externe importants, ces organismes risquent de perdre de vue leurs projets et leurs valeurs d’origine. Pour éviter ces évolutions, il faudrait que les finances publiques ne s'orientent plus seulement vers les projets rentables (comme les Contrat à impact Social - lire ci-dessous), mais conservent un volet du financement de la solidarité nationale. Malgré le désengagement de la puissance publique de ses missions régaliennes et la réduction des financements publics, le secteur de l’ESS ne peut plus être considéré comme un moyen pour les pouvoirs publics de faire des économies.

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