Pour les investisseurs en capital, l'ESG est un facteur de résilience et de pérennité des entreprises

La rédaction | 18 Septembre 2017 | 1338 mots | 1 Intervenants

AFIC

Les investisseurs de l'AFIC, réunis pour leur 6ème conférence annuelle ESG en partenariat avec PwC, intègrent maintenant ces critères dans tous les compartiments du private-equity. Retour sur les tables-rondes, et nos interviews vidéo (en accès libre)

Les investisseurs de l'AFIC, réunis pour leur 6ème conférence annuelle sur l'ESG en partenariat avec PwC, intègrent maintenant ces critères d'"Environnement, Social et Gouvernance" dans tous les compartiments du private-equity. "En tant qu'actionnaires professionnels, nous recherchons la pérennité des entreprises, dans la perspective de sorties à 5 où 10 ans", indique Olivier Millet, Président de l'Association Française des Investisseurs en Capital (AFIC), qui rassemble la quasi-totalité des acteurs du private equity français. "Nous levons beaucoup d'argent institutionnel, qui a de plus en plus d'exigences", ajoute M. Millet tout en insistant sur le fait que "l'ESG est aujourd'hui un sujet de transformation des entreprises, quelle que soit leur taille, leur maturité ou leur secteur d'activité." - voir son interview vidéo ci-dessous. 

Un capital-risque plus résilient

L'approche ESG s'invite maintenant dans toutes les classes d'actifs, explique Sophie Paturle, Managing Partner chez Demeter Partners, en introduction de la table ronde sur la place grandissante de l'ESG dans le capital-risque. Les jeunes pousses sont-elles moins exposées et moins préparées ? Bien au contraire, explique Marc Guyot, qui dirige l'ESG chez LBO France : les jeunes entreprises qui lèvent des fonds intègrent spontanément ces critères, qui réduisent la fragilité du projet entrepreneurial, permettent de mieux gérer la croissance, réduit l'exposition à des risques de grande portée comme le risque numérique, et prépare aux modification de gouvernance lors de tours successifs. Pour une jeune pousse, "la valeur immatérielle précède la valeur financière", insiste-t-il, car ce goodwill est vulnérable et peut être détruit très rapidement - voir ci-dessous son interview vidéo. Une opinion partagée par Sophie Paturle, qui confirme que Demeter Partners veille particulièrement à la R&D qu'il faut valoriser lors des due-diligences ESG en examinant par exemple le portefeuille de brevets de l'entreprise, le profil de ses chercheurs ou encore les budgets qui y sont consacrés. Une approche à laquelle les Limited Partners prêtent de plus en plus d'attention, attendant des performances sectorielles sécurisantes de la part des capital risqueurs, dans un monde de plus en plus ouvert à l'open-innovation qui se retrouve dans les levées : Demeter compte ainsi 35 souscripteurs corporate, y compris des ETI. 
Les entrepreneurs partagent ce point de vue, comme Patrick Guérin, CEO d'OpenHealth Company - qui vient juste de lever 5 M€ auprès de LBO France - Innovation Capital. Fondée en 2015, OpenHealth agrège et analyse des données de santé, sur lesquelles la confiance numérique est cruciale. Si les term-sheets initiales n'incluent pas toujours la dimension ESG, une première évaluation sera faite en pré-closing, davantage dans le dialogue et la compréhension que par une approche lourde et coûteuse. Des échanges qui préparent le futur roadmap ESG qui sera mis en place post-closing, résume le dirigeant. Les indicateurs chiffrés sont bien sûr définis selon l'activité de l'entreprise, comme la sécurité au travail ou le chiffre d'affaires réalisé par des produits éco-innovants. 

Infrastructures : ESG à 360°

Si elle repose sur les mêmes fondements de confiance, l'approche ESG se montre plus exhaustive et plus exigeante en infrastructure, comme l'illustre l'exemple de l'aéroport de Luton (qui dessert Londres) et dans lequel Ardian Infrastructures est investisseur à 49%. C'est une approche à 360 degrés qui est mise en place, aussi bien sur la santé et la sécurité (des personnels, des voyageurs et du trafic), que des sous-traitants comme un contrat d'objectifs de recyclage des déchets passé avec Veolia, ou une surtaxe des commerces ou services de l'aéroport en fonction de la quantité de déchets produits ou d'eau consommée. Le management joue un rôle essentiel et doit parfois passer par une prise de conscience de sa "redevabilité", aussi quantifiée par une batterie de mesures et de signalements ("near misses"). "Nous faisons depuis 3 ans une revue ESG de toutes les entreprises en portefeuille", indique Mathias Burghardt, Head of Ardian Infrastructures Paris (interview vidéo ci-dessous), qui souligne une difficulté : il est difficile, pour des actifs destinés à rester longtemps en portefeuille comme un aéroport, d'estimer sur 20 ans l'évolution des normes de bruit ou d'émissions, des possibilités d'expansion, ou de la décarbonation des transports. Un problème qui se retrouve aussi dans d'autres secteurs sujets à des revirements de régulation, comme les énergies renouvelables. 

Des entrepreneur investis ...

Quel que soit le secteur d'activité, un nouveau type d'organisation fait son apparition et intéresse les investisseurs : l'entreprise à mission ou mission-led company (lire notre article ci-dessous). Emmenées par des dirigeants convaincus de la nécessité de définir pour leur entreprise un intitulé de mission élargi, ces organisations se dotent généralement en parallèle d'une gouvernance originale indépendante du rôle classique d'un conseil d'administration - une tendance qui va de pair avec les évolutions de leur devoir fiduciaire (lire également ci-dessous) envers leurs investisseurs - et s'intéressent souvent à des labels "sociétaux" comme B-Corp. Par exemples : Danone qui, suite au rachat de Whitewave aux Etats-Unis, a incorporé une Public Benefit Corporation, ou Camif-Matelsom, soutenue depuis 2013 par le fonds d'impact investing Citizen Capital emmené par Laurence Méhaignerie. Malgré l'abandon de son statut coopératif lors de sa reprise en 2009 par Emery Jacquillat, l'entreprise veut redonner le pouvoir à ses collaborateurs dans l'élaboration de son processus budgétaire ... et à ses clients qui peuvent choisir leurs produits selon leur lieu de fabrication et leur empreinte carbone. Initiative inédite, l'entreprise et l'investisseur sont tous deux certifiés B-Corp, un label qu'ils sont obtenu en octobre 2015. De son côté, Armor-Lux, une entreprise de textile implantée dans les Côtes d'Armor, s'est faite auditer dans les mêmes conditions que celles qu'elle demande à ses fournisseurs. L'entreprise, qui a décroché plusieurs marchés publics (dont les facteurs de la Poste), rappelle que les donneurs d'ordre sont de plus en plus attentifs à leur risque réputationnel et donc à la performance RSE qui compte pour 10 à 15% de la grille de sélection d'un marché. Armor-Lux exige de chacun de ses sous-traitants directs de justifier d'un audit de moins d'un an, notamment sur des critères d'hygiène et de sécurité : l'important est d'avoir des remontées d'information, indique son dirigeant Grégoire Guyon, afin que le sous-traitant s'inscrive dans une vraie démarche de progrès. 

... et des investisseurs force de proposition

Si les entreprises se mobilisent, les investisseurs de l'AFIC ne veulent pas être en reste. "Le private equity a démarré sur ces questions d'ESG en 2009 ", rappelle Emilie Bobin, Directeur Stratégie RSE et Développement Durable chez PwC qui anime pour la 6ème fois ce rendez-vous annuel, "suivi dès 2010 par la publication du livre blanc Développement Durable et Capital Investissement". (...) Il y a eu depuis une montée en puissance des différentes classes d'actifs" (interview vidéo ci-dessus). Une seconde édition du livre blanc est d'ailleurs en préparation pour la fin 2017. Avec 70 General Partners signataires des Principles for Responsible Investment de l'ONU (UN - PRI), son initiative "IC20" de décarbonation des portefeuilles qui rassemble 17 sociétés de gestion (voir dans notre référentiel data), et la publication inédite d'un rapport ESG annuel (à télécharger ci-dessous), "L'AFIC fait figure de bonne élève au niveau européen", conclut Candice Brenet, Managing Director en charge de l'ESG chez Ardian et Présidente de la Commission ESG de l'AFIC (interview vidéo ci-dessous) qui rassemble déjà une quarantaine d'investisseurs. "Plus de 40% des fonds levés en 2016 proviennent de l'étranger", rappelle-t-elle, une source de capitaux de plus en plus exigeante sur les engagements chiffrés : "attention à ne pas prendre de retard sur la production de data pour faire de vraies démonstrations", renchérit Olivier Millet.  

Interviews vidéo réalisés par RSEDATANEWS à l’occasion de la 6ème conférence annuelle ESG organisée par l’AFIC en partenariat avec PwC, le 13 septembre 2017

INTERVENANTS

>Voir la fiche détaillée de l’opération Certification - CAMIF MATELSOM - B-Corp
Société Cible CAMIF MATELSOM

LIENS DE L’ARTICLE

site web: AFIC - Rapport ESG 2016 (page web): http://www.afic.asso.fr/index.php?page=645

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